Girolata : Quelle solution pour maîtriser la gestion des flux touristiques ?
Avec son label Unesco, le site de Girolata pourrait bien être victime de son succès. Point de passage obligé des touristes et visiteurs, l’afflux est réel, notamment en période estivale. A cette époque, la population y est multipliée par 7. Et la fréquentation oscille entre 1500 et 2000 personnes par jour. Ces audiences record ne sont toutefois pas sans risque tant pour les écosystèmes et autres espaces protégés. ATC, mairie d’Osani et Conservatoire du Littoral étaient sur place, lundi, pour trouver des solutions à ces problématiques.
Patrimoine en danger ! Voilà comment l’Agence de Tourisme de la Corse qualifie cette situation. C’est également le mot d’ordre de la mairie d’Osani et le conservatoire du littoral. Si ces trois instances tirent la sonnette d’alarme, une interrogation affleure : Faut-il un nouveau cadre réglementaire pour mieux gérer l’afflux touristique sur les sites classés ? D’ores et déjà, quels sont les voies et moyens permettant de mieux juguler la « démultiplication » des bateaux de visite sur la réserve dont le nombre croit d’année en année ?
Beaucoup de problèmes
La présidente de l’ATC, Nanette Maupertuis, le maire d’Osani, François Alfonsi et le directeur du conservatoire du littoral, Michel Muracciole étaient sur le site de Girolata ce Lundi 6 Août en début de matinée. L’occasion d’échanger sur ces différentes problématiques. Et d’évoquer la nouvelle vie du Fortin de Girolta, classé monument historique avec un projet de réhabilitation à la clé. De le visiter aussi, ce qui, du reste, est assez rare et mérite d’être souligné.
C’est ainsi que s’est déroulée cette journée de Girolata via Porto avec un bilan d’étape sur l’activité du port de plaisance, la Visite du fortin de Girolata. Pour la première fois, le conservatoire du littoral a ouvert les portes de ce monument historique qui fait partie des centaines de tours défensives érigées à l’époque Génoise. Une évocation du projet de réhabilitation a été entamée et débattue. L’après-midi, une sortie a Scandula a été organisée.
Gestion des flux touristiques
Dès les débuts du développement touristique de la Corse, l’attrait du site a conduit à sa fréquentation. Les premiers établissements ont été créés au milieu des années 60, en s’appuyant sur une plaisance encore « artisanale » qui a vite fait de Girolata une destination privilégiée, et sur les premiers développements de la randonnée pédestre. Les premiers temps étaient ceux d’un accueil totalement rudimentaire : pas d’eau, pas d’électricité, pas d’assainissement, pas de desserte autre que pédestre ou maritime précaire.
Passagers pour Scandula…
La création de la réserve de Scandula par le Parc Régional a fait naître une première compagnie de promenade en mer au milieu des années 70. Depuis cette activité a connu un essor très important, au point d’atteindre, quarante ans plus tard, des seuils de saturation.
La visite de la réserve de Scandula est aujourd’hui un produit-phare de l’activité touristique en Ouest-Corse. Venus d’Aiacciu, Calvi, Galeria, Portu, Carghjese, Sagone, Tiuccia : quand la mer le permet, plus de mille visiteurs-jour sont transportés par les compagnies maritimes qui pratiquent cette visite, dont la plus grande partie fait escale à Girolata.
Il est nécessaire et urgent de trouver des moyens réglementaires pour maîtriser la croissance excessive de cette activité.
Il y a tout d’abord la plaisance. Cette activité qui était encore celle « pionniers » dans les années 70 s’est beaucoup développée depuis. La visite de la réserve de Scandula et l’abri dans la baie sous la tour génoise sont d’une très grande attractivité. Le mouillage improvisé sur ancre dans la baie a longtemps été la règle, ce qui, avec l’accroissement de la fréquentation, a généré des situations vite ingérables. Sans compter l’impact destructeur sur les fonds marins.
La commune d’Osani a structuré il y a une dizaine d’années, avec l’appui de l’Agence du Tourisme de la Corse, une structure d’accueil sous forme d’un port par mouillage, les bateaux étant arrimés sur des bouées.
86 emplacements plaisance
A cette fréquentation nocturne (nuitées de plaisance) s’ajoute une fréquentation diurne : arrivée de nombreux zodiacs de location faisant escale à Girolata le plus souvent en lien avec une excursion à Scandula. La promenade de Girolata, depuis le Col de la Croix, est un « classique » des circuits touristiques. Depuis les années 80, le Parc Régional a inséré ce chemin dans l’itinéraires Mare è Monte qui relie Calenzana à Carghjese. Deux gites accueillent les randonneurs (environ 60 lits).
Côté port, 86 emplacements sont ouverts à l’accueil des plaisanciers. Un chenal d’accès aux pontons fluidifie les va et vient et permet l’accostage sans encombre des vedettes à passagers sur les pontons pour le débarquement de leurs clients.
Chaque plaisancier accueilli est dirigé vers l’emplacement le mieux adapté à son embarcation et aidé pour que son amarrage soit le mieux sécurisé possible. Il est ensuite assisté par les zodiacs communaux pour aller à terre et revenir à bord.
Chaque année environ 4500 bateaux séjournent au port (environ 16000 personnes). Temps de séjour moyen : 1,3 jour. Ce chiffre évolue globalement à la baisse depuis cinq ans, mais avec de unités accueillies plus importantes, ce qui stabilise les recettes. L’accueil des plaisanciers représente 75% du Chiffre d’affaires du port. Il est complété par les redevances demandées aux bateliers (environ 16%) et le produit du stationnement des zodiacs (4%) et les jetons WC/douches (5%). Le Chiffre d’affaires 2017 a été de 266.500 €.
Main d’œuvre locale
La nécessité d’amarrer individuellement chaque bateau, d’assurer la circulation des personnes sur le plan d’eau, et de multiples tâches d’organisation (tenir les pontons libres de toute occupation « sauvage », fourniture d’eau, renseignements touristiques, etc…) engendre un fort besoin en personnels : 12,5 employés dont 5,5 contrats longs (six mois, y compris 3 plongeurs), 3 contrats intermédiaires (4 mois) et 5 saisonniers de plein été (un à deux mois). Tous sont des enfants du village, fixés à l’année ou étudiants.
Au total une trentaine de jeunes ont travaillé sur le port, et, sur l’effectif actuel, les trois quarts sont réguliers d’une année à l’autre.
Eau, assainissement et Ordures ménagères
Girolata dispose d’une ressource en eau suffisante grâce à sa nappe phréatique. En 2017 a été inauguré l’assainissement du village, réseau et STEP. La réalisation de la STEP a permis de réaliser des WC publics et des douches dont l’exploitation est confiée à la structure du port. La réalisation de commodités bien entretenues dans les sites les plus fréquentés est une nécessité pour hausser le niveau de l’accueil touristique de la Corse en général, en faciliter l’acceptation par les habitants permanents, et mieux répondre aux attentes de qualité d’accueil, notamment pour la clientèle étrangère.
Le traitement des OM a été mis en place par la commune d’Osani il y a dix années, et il est transféré désormais à la Communauté de communes Spilonca-Liamone. Sur la petite centaine de tonnes de déchets collectés, 21 tonnes partent en décharge après héliportage. 28 tonnes triées de déchets inertes (verre 20 T, emballages 3T, encombrants 5 T) sont évacuées par mer vers le centre de transfert de Piana, et le reste (cartons, bois et bio-déchets) est composté sur place. Le compost, après tamisage est utilisé par les habitants.
La situation exceptionnelle Girolata, en l’absence de desserte routière, fait de sa gestion un défi quotidien. Accueillant la plupart des usagers de la réserve de Scandula, il doit faire face à une fréquentation importante.
Corsenetinfos.corsica du 7/08/18