Innover ou disparaitre – partie 1
Si l’innovation est essentielle à la pérennité de l’entreprise, comment l’intégrer au sein du modèle d’affaires ?
La Chaire de tourisme Transat de l’ESG UQAM, en collaboration avec Tourisme Montréal, dévoilait le 17 janvier 2018, huit façons de bousculer les modèles d’affaires en tourisme. Les conférenciers, Paul Arseneault et Pierre Bellerose, ont partagé les meilleures initiatives entrepreneuriales et le fruit de leur réflexion afin d’aider les entreprises touristiques à innover.
L’innovation en quelques mots
Innover est essentiel, mais comment faire ? De prime abord, les entreprises doivent saisir que l’innovation ne survient que s’il y a de la place à la spontanéité et de l’ouverture d’esprit. En même temps, elle n’arrive pas par hasard ; elle se planifie en figurant dans le plan stratégique de l’entreprise. Il ne faut plus la percevoir dans un processus linéaire menant du point A au point B, mais plutôt accepter de tourner en rond, de se tromper. Son succès passe par une excellente compréhension des besoins du visiteur.
L’innovation se décline sur trois niveaux :
- Intraorganisationnel ;
- Relation organisation — visiteur ;
- Relation visiteur — territoire.
Certes, innover n’est pas une tâche facile et de nombreux mythes peuvent freiner l’envie de plusieurs de se lancer dans cette aventure.
Voici 4 façons de bousculer les modèles d’affaires en tourisme. La suite se trouvera dans la partie 2 de ce compte rendu.
1- La toile est morte, vive la donnée !
Le tourisme se trouve dans un contexte de changement, notamment sur les plans économique, démographique, environnemental et sociologique. À travers ces chambardements, six révolutions technologiques se développent pour la première fois sur une même période :
- Internet;
- Réseaux sociaux;
- Mobilité;
- Économie collaborative;
- Robots;
- Intelligence artificielle.
Grâce à ces technologies, la collecte de données augmente de façon exponentielle. Les algorithmes et l’intelligence artificielle viennent ensuite modéliser ces données pour les rendre compréhensibles, non sans soulever certains problèmes éthiques.
Cette modélisation des données permet d’accélérer la prise de décision, d’optimiser les processus, d’augmenter l’efficacité et de mieux connaitre les tendances du marché. En tourisme, cela comporte de nombreux avantages. Il est possible de mesurer, de comprendre et de prévoir les flux touristiques, de mieux gérer la relation client et d’améliorer l’expérience en ligne.
Les algorithmes et l’intelligence artificielle incitent les destinations à changer leur approche qui devient plus centrée sur le touriste et ses intérêts. En ce sens, la plateforme de gestion des données est un outil intéressant permettant de recueillir, de segmenter, d’analyser et de déployer un vaste ensemble de données. Pensons à la station de ski Val Thorens qui a innové en créant sa stratégie de destination autour de la gestion des données et de la relation client. L’organisation s’est démarquée par son leadership transformateur, sa patience et son courage. Pour sa part, Tourisme Montréal a créé un nouvel écosystème numérique pour accompagner le visiteur le long de son parcours Web. Ce projet a été mis en place grâce à une plateforme de gestion des données (Data Management Platform) qui permet de recueillir, de segmenter, d’analyser et de déployer un vaste ensemble de données d’audience à partir de plusieurs sources. Tourisme Montréal a donc pu évaluer le cycle du voyageur pour mieux prédire ses actions et lui proposer par la suite des expériences bonifiées.
Source : Tourisme Montréal et Val Thorens
2- Intégrer l’agilité des start-ups
Les start-ups possèdent une agilité que plusieurs entreprises touristiques ont perdu de vue. Développer une collaboration avec elles ou les intégrer au sein même d’une organisation constitue un avantage. Elles amènent une nouvelle conception de la mise en tourisme et du développement territorial. Pour que cette intégration soit réussie, il faut que cela soit fait dans un écosystème qui permet d’avoir du temps, des lieux de rencontre ainsi que des besoins et des enjeux bien identifiés.
Plusieurs incubateurs touristiques supportent l’innovation et les start-ups. Ils deviennent ainsi de nouveaux acteurs de l’expérimentation. Les innovations qui en ressortent auront un rayonnement pour tous les acteurs impliqués. Depuis 2017, Montréal accueille le premier incubateur d’innovations en tourisme, culture et divertissement en Amérique du Nord : le MT Lab. Avec ses partenaires, l’incubateur accompagnera les start-ups motivées à valider leur modèle d’affaires et à la mise en marché de leur produit ou service.
Certaines entreprises touristiques ont aussi pris le pari de servir d’incubateur à l’innovation. Marriott, avec son programme d’accélération de start-ups TestBed, donne l’occasion aux jeunes entreprises de tester leurs produits dans un hôtel de la chaîne (voir la vidéo ci-dessous). La compagnie ferroviaire française SNCF a décidé d’aller plus loin en structurant la façon de collaborer avec les start-ups. Avec ses nombreuses associations et sa foultitude d’actions innovantes, SNCF est devenu un acteur majeur dans l’industrie du transport et du tourisme. Misterfly a intégré directement l’agilité des start-ups dans l’ADN de son entreprise. Pour leur part, Alliance Biz Travel est un regroupement de start-ups qui présente une gamme de services complémentaires aux voyageurs d’affaires mais où chacune conserve son autonomie et son agilité.
3 – L’intégration de l’intelligence artificielle
Dans les prochaines années, l’intelligence artificielle (IA) aura un impact important dans la société. Cette technologie imite l’intelligence humaine à l’aide de procédés informatiques. Elle extrait une information et en déduit une décision, grâce à un apprentissage automatique qui tente de modéliser des données. Les applications inspirées de l’intelligence artificielle auront d’importantes conséquences sociales.
L’un des secteurs du tourisme qui sera grandement affecté par l’IA est celui de l’assistance personnalisée. Cette dernière consolidera de manière intelligente les diverses interfaces numériques avec le touriste : outil de recommandations pour améliorer l’engagement des clients, traduction instantanée, robotisation, chatbots. Ces derniers sont réellement performants s’ils sont capables d’apprendre, soit de modifier les décisions avec l’intégration de nouvelles données. Dans le domaine de l’intelligence artificielle, cette notion d’apprentissage fait toute la différence en ce qui a trait à la performance du service.
À titre d’exemple, VisitOrlando a créé une application mobile basée sur l’intelligence artificielle et la réalité augmentée. L’objectif de la destination est d’aider les visiteurs à maximiser leurs vacances d’une manière significative. L’application permet, entres autres, de recevoir des réponses selon plusieurs facteurs spécifiques comme la météo, les lieux ou les intérêts de l’utilisateur.
Source : VisitOrlando
L’application Lola intègre l’intelligence artificielle dans son offre de réservations de voyages d’affaires. Il s’agit d’un service de conciergerie personnalisée qui combine agents de voyages et intelligence artificielle, ce qui permet de recueillir des données et de développer progressivement un profil de client détaillé.
Source : Lola
4 – La réintermédiation
Une nouvelle forme d’intermédiation du voyage prend son essor avec le numérique. Dans son état actuel, la vente ne peut plus survivre en « silos » et les collaborations sont devenues vitales. Conséquemment, de nouvelles formes de mise en relation entre les voyageurs et les prestataires touristiques apparaissent, encourageant davantage les entreprises traditionnelles et locales.
Evaneos est un exemple d’un nouveau type d’intermédiaire qui a fait son apparition dans l’univers de la distribution. Il s’agit d’une plateforme qui met en relation les voyageurs et les agences réceptives locales. Leur concept valorise l’expertise d’agents locaux auprès d’un public outre-mer et les retombées sont beaucoup plus avantageuses pour les milieux visités.
Grâce au ciblage comportemental, iAdvize repère les clients qui semblent hésiter et auraient besoin de conseils. Ces internautes sont alors conseillés en temps réel par d’autres clients ambassadeurs et non pas par des vendeurs de la marque.
Busbud a développé une plateforme de réservations en ligne de transport en autobus. Il s’agit du plus grand réseau de transporteurs et de la plus grande base de données d’horaires de bus au monde.
veilletourisme.ca du 18/01/18
Etude réalisée par Julie Payeur