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Le temps d’innover… autrement!

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Le temps d’innover… autrement!

27/02/20

Plusieurs questions se posent lorsqu’on parle d’innovation. La première, comment innover dans un contexte de changements rapides? Les données s’avèrent importantes, mais le facteur humain l’est tout autant. Les besoins sont nombreux et plusieurs éléments peuvent accélérer ou même freiner l’innovation.

La Chaire de tourisme Transat, en collaboration avec Tourisme Montréal, a dévoilé, le 21 janvier, les sept tendances qui continueront de rythmer l’activité touristique pour les prochaines années. Les conférenciers Paul Arseneault et Pierre Bellerose ont partagé le fruit de leur réflexion afin d’aider les entreprises à amorcer la nouvelle décennie.

Si l’on observe des changements rapides de valeurs et de comportements chez les voyageurs, la question qui se pose est la suivante : comment innover dans un contexte aussi fluide? Comment développer sur quelques années une réponse qui sera toujours appropriée lorsque l’innovation deviendra accessible?

Les mégadonnées sont mortes, vive la donnée intelligente!

En 2019, on a plusieurs fois annoncé la « mort » des mégadonnées (big data) ou du moins de la façon dont on les compile et on les utilise. La majorité des entreprises ne savent pas comment les interpréter pour développer des outils d’aide à la prise de décision qui sont adéquats. En fait, suivre les consommateurs dans leur parcours actuel en tentant de prévoir leur comportement futur à l’aide des seules mégadonnées présente plusieurs failles, la principale étant la cause de ce comportement.

La donnée intelligente (smart data) est celle qui, dès son point de collecte, possède tous les attributs (qualité, pertinence, contexte) pour se transformer instantanément en information exploitable, à laquelle on ajoute le facteur humain (interprétation).

La 5G — trente fois plus rapide que la 4G — engendrera des impacts majeurs sur le tourisme, par exemple en permettant la connectivité massive (qui modifiera à jamais l’industrie du divertissement) et une croissance exponentielle des milliards d’objets connectés déjà présents dans nos vies quotidiennes. La 5G est arrivée discrètement en 2019 à Montréal et dans les principales villes canadiennes. Le tout devrait s’accélérer en 2020. Notre univers technologique changera rapidement… à la vitesse 5G. 

Mieux intégrer le facteur humain dans l’innovation

Dans le contexte anxiogène actuel, le voyage devra offrir des réponses plus personnalisées que jamais à une foule de besoins et d’attentes à « réinterpréter », parfois simples, parfois complexes. Comment l’innovation peut-elle y participer? Comment mieux intégrer le facteur humain sans en arriver à des propositions tout bonnement maquillées aux couleurs des dernières nouveautés technologiques?

Comment appuyer le voyageur en solo qui désire seulement s’isoler d’un quotidien trop exigeant ou le même touriste, maintenant en quête d’aventures uniques et marginales? Comment aider les destinations à relever le défi de la satisfaction de voyageurs plus sensibles au respect des environnements et des populations des lieux visités?

Si l’innovation en tourisme commence par une connaissance approfondie des besoins et des aspirations des voyageurs, les innovations technologiques ou autres devront non seulement répondre techniquement à des exigences logistiques de ces voyageurs, mais aussi anticiper la façon de les accompagner. Le tout, afin que chacune des étapes du parcours client soit teintée des valeurs du voyageur, les soutienne et apporte des réponses à ce qui va à leur encontre. On peut croire que les sciences du comportement joueront un rôle de plus en plus important dans les années à venir.

Les besoins d’innovation

Pour l’année 2020-2021, les grands partenaires du MT Lab ont déterminé huit besoins d’innovation :

Autour du visiteur-voyageur 

  1. Apprendre à le connaître pour mieux répondre à ses besoins;
  2. Optimiser et personnaliser son arrivée à destination;
  3. Faciliter ses déplacements pour fluidifier son parcours;
  4. Offrir des activités toujours plus immersives et responsables;

Autour du lieu, de la destination 

  1. Optimiser la productivité et le fonctionnement des infrastructures d’accueil;
  2. Valoriser les occasions d’emploi et trouver des solutions à la pénurie de main-d’œuvre;
  3. Attirer, diversifier, fidéliser la clientèle;
  4. Accroître les retombées sociales et locales, et limiter l’impact environnemental.

Innovation : accélérateurs et freins

L’expérience antérieure nous démontre que l’innovation passe par :

  1. La planification :

    • En faire l’un des objectifs prioritaires de l’organisation,
    • Prévoir le temps et les ressources nécessaires,
    • Mutualiser le risque (collaborer avec les associations sectorielles et régionales),
    • Repenser la gouvernance en amont,
    • Faire de la place et donner du temps à l’innovation,
    • Intégrer des critères d’innovation dans les programmes d’aide;
  1. La nécessité de s’exposer à l’innovation :

    • Se tenir à l’affût des tendances,
    • Prendre des risques individuels et collectifs;
  1. La sérendipité :

  • Trouver autre chose que ce que l’on cherchait,
  • Être agile;
  1. Le réseautage :

  • Fréquenter des gens intelligents;
  1. L’importance de laisser de la place au réseau d’innovation dans les CA ou dans les instances de gouvernance.

L’expérience nous démontre aussi que l’innovation est souvent freinée par :

  1. La taille des entreprises :

  • Le clivage entre PME sans ressources et grandes entreprises peu flexibles;
  1. La force d’inertie :

  • La difficulté à remettre en question son modèle contractuel et de gestion,
  • Le manque d’agilité et de flexibilité pour intégrer l’innovation;
  1. L’incapacité à développer des modes de financement adaptés à l’innovation en tourisme;

  2. L’absence d’accompagnement — régions – secteurs – organisations;

  3. Les exigences de résultats rapides :

  • La difficulté d’allouer le temps et les ressources nécessaires à la réalisation des projets,
  • Les exigences pour passer d’une démonstration de faisabilité (proof of concept, POC) à une organisation pérenne;
  1. Le manque d’une vaste gamme d’expertises tant dans les incubateurs que dans les grandes organisations.

En résumé…

L’ensemble de leur réflexion a montré aux conférenciers à quel point nous sommes dans une ère où les choses vont vite. Tellement, que cela peut en rendre certains anxieux. Nous sommes exposés à une pléiade de nouvelles avancées qui nous interpellent et qui peuvent en déconcerter plus d’un. Où aller? Comment y arriver? Que faire, et avec qui, face au changement? Paradoxalement, le niveau de vie collectif en Occident n’aura jamais été aussi élevé, et l’accès au voyage, aussi démocratisé.

L’innovation sert de fil conducteur et donne un sens — verticalement et horizontalement — à une nouvelle gouvernance du tourisme qui repose sur des compétences et des rapports nouveaux, non plus de force, mais de collaboration entre les acteurs privés, publics et associatifs.

Nous voyons également poindre de nombreuses initiatives de création de lieux d’incubation et d’accélération à l’échelle mondiale. Par ailleurs surgit une volonté de créer un réseau de ces mêmes incubateurs touristiques. Cela témoigne de la récente prise de conscience du caractère stratégique et structurant de l’innovation en tourisme.

Cependant, la poussée du numérique a pu laisser croire à certains prestataires touristiques — hôtels, restaurants, sites et attraits — que de nouvelles solutions, faciles à implanter et peu coûteuses, venaient d’apparaître par magie. Cela s’explique par la taille majoritairement modeste des entreprises du tourisme et par le peu de temps à accorder à la prospective de marché et de gestion. Et, bien que toute la connaissance du monde puisse loger dans la mémoire d’un téléphone intelligent, l’utilisation de ce dernier est trop souvent superficielle, voire futile.

veilletourisme.ca du 17/02/20

Etude réalisée par Paul Arseneault

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