Leisure vs Business Travel : comment les nouvelles pratiques devraient-elles influencer le travel management ?
J’aime le dire et le répéter, avant d’être des voyageurs d’affaires, nous sommes des voyageurs tout court (comprenez voyageurs loisirs), et avant même cela, nous sommes des consommateurs.
Je vais commencer par enfoncer une porte ouverte : la frontière entre vie professionnelle et vie personnelle est devenue très poreuse.
Un fait qui n’est pas négligeable : l’environnement de travail évolue, avec les Millennials qui vont représenter 50% de la force de travail globale d’ici 2020, d’après une enquête de PwC (“Managing tomorrow’s people – the future of work 2020”).
Étant moi-même GenY, je pose la question : pourquoi y a-t-il autant de gaps lorsqu’on entre dans le monde Corporate ?
Prêts pour un petit exercice ?…
Citez 3 de vos marques/sites web travel favoris… Plutôt facile, non ?
Maintenant, projetez-vous dans votre monde Corporate… Citez 3 outils que vous adorez utiliser lorsque vous planifiez un déplacement professionnel… Avez-vous le même enthousiasme ?
Très bien… Je crois que vous m’avez comprise !
Et justement, pourquoi ne pourrait pas ton avoir le même enthousiasme ?
Penchons-nous sur 3 (nouveaux) codes qui régissent notre quotidien de consommateurs… Personnellement, je pense que cela créé des attentes chez les collaborateurs en entreprise, notamment les plus jeunes, et par extension cela impacte la gestion de l’activité Business Travel.
La démarche participative : on nous demande notre avis
Aujourd’hui nous sommes (très) sollicités dans notre vie quotidienne. On nous demande de noter notre expérience lorsqu’on se rend dans une boutique, au guichet d’un commerce, à l’issue d’un contact avec un service clients, ou bien suite à une commande en ligne… On nous demande de déposer un avis en ligne sur notre expérience à l’hôtel, chez notre hôte, ou même sur l’article high tech ou les derniers collants de sport que l’on vient d’acheter. Des entreprises comme Uber ont révolutionné les systèmes de notations : on note son chauffeur de manière simple avec un système d’étoiles et une sélection de critères qui nous ont particulièrement plu ou déplu, d’un simple « tap », à chaud, en sortant du véhicule, via une simple notification et surtout depuis son smartphone.
Autre exemple : de plus en plus d’émissions de télévision proposent des sondages en live via Twitter. Le téléspectateur peut orienter l’émission et peut dialoguer avec les animateurs ou avec les autres téléspectateurs.
Le Contenu Généré par l’Utilisateur (CGU), donc par NOUS, est colossal. Il est même souvent plus puissant et plus rapide que les sources officielles. Il n’y a qu’à voir au quotidien l’info trafic en ligne (notamment avec les #qml #RERA etc.) ou encore Waze mis à jour en temps réel grâce à ses utilisateurs.
La notation et l’interaction en temps réel se sont considérablement généralisées.
Quels enseignements pour le voyage d’affaires ?
La démarche participative correspond à des nouveaux codes de communication qui sont en train de se mettre en place, notamment auprès des plus jeunes.
Sonder et engager avec ses voyageurs permettrait certainement aux entreprises d’obtenir une meilleure satisfaction et une meilleure application de ses process. Il s’agit tout simplement d’impliquer davantage les collaborateurs dans les décisions liées à la politique voyage, de mettre à leur disposition des services qu’ils attendent, et d’adapter les méthodes de communication. En d’autres termes, il ne s’agit pas uniquement de tenir le bâton et d’être proactif.
La personnalisation : on adapte les services à nos préférences
Dans ma vie de consommatrice, lorsque j’achète mon café chez Starbucks, on inscrit mon prénom sur ma « cup ». Je peux personnaliser mes baskets Nike ou Adidas. Je peux customiser mon pot de Nutella… Et même ma bouteille de Coca Cola porte mon nom ! Saviez-vous que la campagne marketing de Coca Cola « Share your coke » avec des bouteilles étiquetées aux prénoms des consommateurs a vu les revenus de la marque augmenter de 2,5% dès la première année ? (source Wall Street Journal ; RTL), en plus des centaines de milliers de photos partagée sur les réseaux sociaux avec #partagezuncocacola.
ême ma télé me connaît ! Saviez-vous que House of Cards, la célèbre série de Netflix avec Kevin Spacey, a été créée à partir de Big Data et une analyse fine des comportements et des besoins des utilisateurs ? La puissance des algorithmes de Netflix est d’ailleurs utilisée pour générer des recommandations très précises aux clients. Et je ne développe pas sur le machine learning et toutes les informations que les marchands peuvent connaître sur nous, rien que par de simples interactions…
Côté Travel, l’hébergement commence à se réinventer avec les hôteliers qui développent des concepts forts afin de séduire les jeunes générations. AccorHotels a récemment dévoilé son nouveau concept Jo&Joe, Marriott a développé la marque Moxy, The Ascott lance Lyf (Live Your Freedom). Le point commun de ces nouveaux concepts ? Des espaces de co-living et de co-working qui en font des environnements dynamiques pour favoriser les échanges.
Quels enseignements pour le voyage d’affaires ?
Mettre en place une procédure unique et standardisée ne correspond pas (plus ?) à la réalité des profils des voyageurs : le « one size fits all » est révolu ! Aujourd’hui, la logique se dirige davantage vers de l’individualisation. Dans cette idée, pourquoi ne pas chercher à définir des groupes de voyageurs aux besoins similaires, et leur proposer une politique voyage qui leur correspond davantage ? La segmentation pourrait être une solution afin d’optimiser le respect de la politique voyage.
Qui plus est, la tendance globale va vers l’expression de soi et le partage, sur un fond émotionnel. Les marques semblent capitaliser là-dessus. Ceci qui me conduit au troisième et dernier point.
L’expérience : on nous apporte de la valeur
Vous n’avez pas pu passer à côté de deux annonces majeures récentes : Google Trips et Trips by Airbnb. Le premier permet d’organiser son voyage et, une fois sur place, d’accéder à de nombreuses informations, même sans connexion ! Google capitalise sur les données qu’il a sur nous (le point d’entrée est notamment l’email, d’où il obtient toutes nos informations de voyage), ce qui n’est pas sans souligner des questions sur la sécurité et la confidentialité des données, je le concède. Le second est Trips by Airbnb. Sur le site d’Airbnb, on parle d’ailleurs d’expérience et non plus de réservation, avec la possibilité d’organiser des activités avec des guides locaux. Une porte d’entrée idéale pour parfaire son déplacement professionnel en découvrant la destination (on parle bien de Bleisure). Les points forts de ces apps ? Elles vont nous offrir une meilleure ergonomie et nous donner des informations souvent plus riches que celles que va nous proposer notre entreprise.
Au-delà de cela, dans notre vie de tous les jours, nous utilisons de plus en plus le chat. Qui n’a pas au minimum WhatsApp, Messenger, Skype, voire même Slack installé sur son smartphone ? Uber par exemple s’est intégré à Messenger et permet de réserver un véhicule d’un simple « tap » sur l’adresse que votre contact vous envoie sur Messenger. Et bien sûr, nul besoin de se soucier du paiement puisque la carte est liée à votre profil. Ceci nous apporte une expérience « seamless ». Aujourd’hui la technologie va plus loin avec de l’accompagnement et de l’assistance voyageurs via des robots conversationnels (chat bot), en ajoutant une couche d’intelligence artificielle.
Quels enseignements pour le voyage d’affaires ?
« Sois là, où je suis ! ». Tel est le message que j’ai envie de faire passer. Lorsqu’on sait que les organisations ont un peu de mal à faire adopter l’app de la TMC, on peut se demander si ces nouveaux services tellement pratiques et simples d’utilisation ne vont pas supplanter les apps classiques. Ou inversement, cela va contribuer à encourager les protagonistes du secteur à développer des outils « sexys ». La mouvance est déjà en marche, avec des premières initiatives s’appuyant sur de l’intelligence artificielle ou encore la recherche vocale. Les voyageurs vont utiliser un service particulièrement lorsqu’il apporte de la valeur.
Le mot de la fin
Je terminerai sur une évidence : l’influence de notre vie de « consumer » est plus forte que jamais, particulièrement auprès des jeunes générations qui arrivent en entreprise avec leurs nouvelles pratiques. Cela peut créer des clashs générationnels et influence forcément le travel management.
La recette qui marche ressemblerait-elle à des principes comme :
- On pense à nos besoins avant tout : le fameux « traveller centricity ».
- On ne développe pas (plus) des outils en fonction de besoins de l’industrie mais en fonction des usages.
- On crée le besoin en innovant et en proposant une valeur ajoutée.
Mais la question est la suivante : combien d’organisations sont assez matures dans leur culture d’entreprise pour adopter ces principes ?
Source : tom.travel