Les hôteliers du golfe d’Ajaccio suspendent leur collaboration avec booking[.]com
Originellement sources d’opportunités, les agences de voyage en ligne, au premier rang desquelles Booking.com, sont devenues des entreprises prédatrices pour les hôteliers : hégémonie commerciale, pratiques fréquemment en limite du droit, taux de commission exorbitants, sans rapport avec le service rendu.
Les hôteliers sont passés en 15 ans d’un écosystème historique, dans lequel ils réglaient des commissions d’environ 10% à des agences de voyage ayant pignon sur rue, payant salaires, loyers, impôts et charges en France ou en Europe, à un nouveau modèle dominé par les plateformes numériques, dans lequel les réservations sont totalement automatisées, ne génèrent aucun emploi ou presque, et où les intermédiaires ne s’acquittent pas, si ce n’est à la marge, des contributions normalement dues par toute entreprise opérant en France et dans l’Union Européenne.
En toute logique, l’hyperefficience technologique et l’habileté juridique et fiscale de ces plateformes numériques auraient dû entraîner à une baisse des commissions dues par les opérateurs touristiques à leurs intermédiaires.
Il n’en est rien : celles-ci ont doublé en l’espace d’une décennie, franchissant souvent la barre des 20% !
La raison en est simple : les agences de voyage en ligne sont en situation d’oligopole, opérant sur un marché aux mains de quelques géants américains, notamment Booking Holdings (maison-mère de Booking.com, La Fourchette, Kayak…) et Expedia Group (maison-mère d’Expedia, Voyages Sncf, Trivago, Abritel…). Elles imposent aujourd’hui leur loi aux hôteliers, y compris parfois et comme constaté récemment, en contradiction avec les réglementations françaises et européennes.
Durant la crise qui nous frappe, les agences de voyage en ligne ne remplissent en rien le rôle qui devrait être le leur, celui de partenaire des hôteliers et d’intermédiaire de confiance pour leurs clients communs. En particulier, Booking.com a été aux abonnés absents pour les hôteliers au cours des derniers mois, sauf lorsqu’il s’agissait de faire de l’ingérence malvenue, à son unique profit :
- La plateforme n’a fait aucun geste, aucune proposition pour soutenir la profession ;
- com a placé les hôteliers dans des positions inconfortables vis-à-vis de leurs clients, les obligeant à procéder à des remboursements, parfois sans leur demander leur avis, alors même que la loi (Ordonnance du 25 mars 2020) leur permettait de proposer des reports de séjours sans frais et des à-valoir ;
- Dans un contexte économique incertain, elle empêche les hôteliers de décider pleinement de leur politique commerciale, prenant de fait la main sur les conditions de réservation et d’annulation, et leur proposant même d’outrepasser le cadre légal en vigueur, qui offre pourtant une protection substantielle aux consommateurs ;
- com n’a pas cessé de commercialiser des meublés touristiques alors même qu’un arrêté préfectoral interdisait cette activité en Corse (comme dans de nombreux territoires), en raison du risque sanitaire qu’ils représentaient ;
- La plateforme continue d’ailleurs de mettre largement en avant ces logements, véritables hôtels clandestins pour certains, alors que 80% d’entre eux ne sont même pas déclarés auprès des municipalités, comme la loi les y oblige pourtant ;
- Encore ce jour et durant les dernières semaines, on a pu constater que des résidences sénior (!) y étaient commercialisées à la nuitée pour les touristes de passage, malgré les risques que ce genre de pratique peut représenter pour les résidents permanents de ces structures en période de pandémie.
Face à ce constat, l’association attend plusieurs réponses urgentes de la part de la plateforme, à la hauteur des enjeux de la situation :
- Baisse substantielle des commissions pour l’ensemble de ses adhérents ;
- Mise en avant réelle de l’hébergement en règle avec la loi par rapport aux hébergements non-déclarés, ces derniers devant être éliminés des hébergements commercialisés ;
- Respect de la loi et fin de l’ingérence dans les politiques commerciales des hôteliers.
Dans cette attente déterminée, la totalité des hôteliers et exploitants de résidences de tourisme ajacciens, ainsi que la plupart de ceux des communes limitrophes – membres de l’association – ont décidé de suspendre leur collaboration avec Booking.com, notamment pour le mois d’août 2020, durant lequel ils ont fermé leurs stocks de chambres et appartements disponibles sur la plateforme.
L’ensemble des établissements demeure bien sûr réservable en direct sur la période et, pour l’instant, sur d’autres agences de voyage en ligne.
Dans ce contexte enfin, les Hôteliers du Golfe d’Ajaccio appellent les organisations et associations professionnelles, ainsi que les autres entreprises du tourisme insulaire concernées, à les rejoindre dans leur combat.
tendance hôtellerie du 5 juin