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Loi Montagne : ce qui va changer

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Loi Montagne : ce qui va changer

05/01/17

Plus de trente ans après la loi de 1985, la nouvelle loi Montagne a été promulguée. Couverture numérique, services publics, urbanisme, tourisme, saisonniers… le texte a été largement enrichi au cours des débats menés tambour battant, avec 95 articles au lieu des 25 de départ. Si pour les stations de ski, il garde un goût d’inachevé, elles ont quelques raisons de se réjouir avec la possibilité de conserver leur office de tourisme et des règles d’urbanisme assouplies.

La loi Montagne est parue au Journal officiel le 29 décembre. Un texte de 95 articles contre les 25 de départ… « L’aboutissement d’un long processus de concertation qui a fortement mobilisé tous les acteurs de la montagne durant deux ans », s’est félicitée l’Anem (Association nationale des élus de la montagne) au lendemain de son adoption définitive. La loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, venue actualiser la célèbre « loi Montagne » de 1985, « aborde tous les sujets et changera concrètement la vie en montagne », assure-t-elle, après avoir largement oeuvré en ce sens. De fait, si le texte manquait de relief à l’origine, il aborde à présent toutes sortes de domaines : couverture numérique, situation des saisonniers, désertification médicale, écoles et transport scolaires, tourisme et urbanisme – avec la nouvelle procédure des unités touristiques nouvelles (UTN)… Ces deux derniers sujets – tourisme et urbanisme – donnent même à penser que la loi a été formatée pour les stations de ski, même si les maires de ces dernières s’en défendent et parlent de « texte inachevé ». La loi permet tout d’abord de déroger à la loi Notr pour permettre aux stations classées de préserver leur compétence « promotion du tourisme » et par la même occasion leur office de tourisme. Ce qui était une demande forte des grandes stations de ski pour lesquelles le nom est aussi une marque.

Urbanisme

S’agissant des UTN, la loi a apporté un peu de souplesse sans toutefois donner libre cours à l’urbanisation. Depuis une quarantaine d’années, ces UTN visent à maîtriser les constructions en montagne. La loi vient rénover cet outil juridique (article 71). Tout d’abord « les extensions limitées inférieures aux seuils des créations d’unités touristiques nouvelles fixés par décret en Conseil d’Etat ne sont pas soumises » au régime. La loi introduit par ailleurs une distinction selon la taille des projets. Les « UTN locales », plus modestes, sont soumises au PLU quant aux « UTN structurantes », elles dépendent du Scot. Reste cependant à fixer par décret les seuils entre ces différentes UTN. Le ministre de l’Aménagement du territoire, Jean-Michel Baylet,  s’est engagé à ce que ce décret soit présenté devant le Conseil national de la montagne avant publication. Mais il faut rappeler que les trois quarts des stations de ski ne sont toujours pas couvertes par un Scot. Pour encourager leur élaboration, une disposition sur la loi Grenelle de 2010 prévoyait que les communes non couvertes au 1er janvier 2017 seraient soumises à un principe d’urbanisation limitée et ne pourraient donc pas envisager de nouvelles zones de construction. Or la loi a introduit un moratoire de deux ans jusqu’au 1er janvier 2019. Les stations de montagne, arguant de la lourdeur de ces procédures, auraient préféré une dérogation pure et simple, comme l’avaient proposé les sénateurs. Ce que n’a finalement pas retenu la CMP.
On notera par ailleurs que « lorsque des remontées mécaniques n’ont pas été exploitées durant cinq années consécutives », le préfet du département mettra en demeure l’exploitant de procéder à « leur mise à l’arrêt définitive ».

Numérique

Les mesures relatives au numérique, après des remous au Sénat, sont revenues à des termes plus consensuels. Exit donc une redéfinition des zones blanches, de même que les pouvoirs élargis de l’Arcep pour forcer les opérateurs mobiles à la mutualisation. En revanche, l’exemption de l’imposition forfaitaire des équipements radio-électriques (Ifer) pour les antennes-relais installées en zone de montagne, et ce jusqu’en 2020, est confirmée (article 34) ; et ce pour rendre plus attractive l’amélioration de la couverture mobile. Le texte vise, plus généralement, à favoriser le numérique en montagne, en invitant l’Arcep à prendre en compte les contraintes physiques du milieu (article 29, article 38, article 41), à favoriser des expérimentations autour d’un mix technologique (article 29), ou encore en rendant obligatoire l’élaboration d’une stratégie des usages et services numériques en zone de montagne (article 33).
La loi Montagne a également offert un véhicule législatif de choix pour des dispositions plus générales. L’article 30 autorise les collectivités à mettre en place des conditions tarifaires préférentielles sur les réseaux d’initiative publique (RIP) pour accélérer leur commercialisation ; l’article 35 invite l’Arcep à produire des statistiques à même d’évaluer la concurrence sur les RIP. Enfin, sur le plan du déploiement de la fibre optique, l’article 32 permet aussi de basculer une commune de la zone Amii en zone d’initiative publique, quand celle-ci n’a pas fait l’objet d’un projet de conventionnement par un opérateur privé avant le 1er juillet 2017.

Services publics

La loi prévoit plusieurs dispositions sur l’accès aux services publics. Afin de lutter contre les déserts médicaux, les médecins retraités pourront continuer à exercer dans les zones caractérisées « par une offre de soins insuffisante ou des difficultés dans l’accès aux soins » (article 22) ; ils bénéficieront d’une exonération de moitié de leur cotisations sociales, de même s’ils réalisent un remplacement dans toute zone de montagne.
Par ailleurs, la carte scolaire devra tenir compte pour les seuils d’ouverture et de fermeture de classes des « caractéristiques montagnardes, de la démographie scolaire, de l’isolement, des conditions d’accès et des temps de transports scolaires » (article 15). Rien cependant n’est envisagé pour le collège.

Agriculture

Alors qu’initialement le projet de loi était quasiment vide s’agissant de l’agriculture (en dehors de la lutte contre les prédateurs et la filière bois), le texte final comporte quelques dispositions nouvelles, comme la suppression de la TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques) et de la TVA sur la TICPE pour les camions réalisant la collecte de lait en zone de montagne (article 61). La loi encourage aussi la remise en exploitation des terres en friches depuis moins de quarante ans (article 56).

Saisonniers

Les conditions des saisonniers se trouvent améliorées par une série de mesures : prise en charge mutualisée de la protection sociale (article 43), encouragement de la formation bi-qualifiante par les organismes de formation (article 42), activité partielle dans les régies de remontées mécaniques (article 45), intégration des « maisons des saisonniers » dans les maisons de service au public (article 46), amélioration des conditions de logement (article 47 et 48).
On notera par ailleurs la suppression de la possibilité de créer des « zones de tranquillité » au sein des parcs naturels régionaux et des parcs nationaux.
Enfin, la loi contient un « cavalier » ajouté par le gouvernement lors du passage au Sénat sur la société Tunnel Euralpin Lyon Turin. Celle-ci se voit dotée de tous les droits en matière d’expropriation, avec obligation pour elle d’indemniser les biens expropriés. Les modalités de remboursement par l’Etat du montant des indemnisations des biens expropriés et des acquisitions amiables supportées par Tunnel Euralpin Lyon Turin feront l’objet d’une convention passée avec l’Etat (article 95). Cette disposition qui avait été ajoutée au projet de loi Sapin 2 avait été retoquée par le Conseil constitutionnel.
  veilleinfotourisme du 5/01/17

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