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Nanette Maupertuis : « Pour lutter contre la baisse de fréquentation touristique, il faut s’adapter et jouer collectif »

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Nanette Maupertuis : « Pour lutter contre la baisse de fréquentation touristique, il faut s’adapter et jouer collectif »

20/12/19

L’attractivité de la destination Corse s’est invitée à l’Assemblée de Corse, jeudi matin, par le biais d’une question orale posée par le président du groupe Andà per Dumane et maire de Bunifaziu, Jean-Charles Orsucci, qui s’est ému de la baisse de la fréquentation touristique. Il a interpellé la conseillère exécutive et présidente de l’Agence du tourisme de la Corse (ATC), Nanette Maupertuis, sur les mesures qu’elle comptait prendre pour inverser la tendance et inscrire l’île dans un modèle durable. Rappelant le cap éco-touristique de sa feuille de route, Nanette Maupertuis a répliqué que, dans un contexte mondial morose, il fallait s’adapter, jouer collectif, et gagner la bataille sur les marchés extérieurs.

C’est un constat, qu’il qualifie lui-même de « malheureux » et « amer », que le maire de Bunifaziu, a livré à l’Assemblée de Corse, à l’aune de la prochaine saison estivale. S’inquiétant de la baisse de la fréquentation touristique  – 7%  selon l’INSEE – après des années de hausse, il alerte sur son impact dans l’activité économique insulaire, notamment sur les emplois directs et indirects que le secteur génère. La réponse, estime-t-il, « doit forcément s’inscrire dans une démarche de valorisation de ce secteur souvent jugé avec démagogie et excès ». Dénonçant ceux qui « utilisent la notion de sur-fréquentation de sites touristiques identifiés pour combattre le tourisme », il propose de « passer d’un tourisme subi à un tourisme durable et maîtrisé, pour la bonne santé des entreprises insulaires et l’accueil de nos visiteurs comme pour l’acceptation sociale de la population ».

Une volonté politique réelle ?
Pour cela, Jean-Charles Orsucci s’appuie sur l’exemple de sa commune : « A Bonifacio, nous avons fait le pari de l’extension de la saison estivale et, aujourd’hui, nous pouvons affirmer que l’activité touristique débute au mois d’avril pour se terminer à la Toussaint. Si cette cité bénéficie d’atouts patrimoniaux et environnementaux considérables, je suis persuadé que ce chemin existe pour la Corse, mais seulement si l’action est guidée par une réelle volonté politique ». S’il ne met pas en doute ladite volonté de la présidente de l’ATC d’ailleurs exprimée dans une « feuille de route de haute qualité », il est moins convaincu de celle de ses partenaires : « Malheureusement, au-delà des grands principes, je ne suis pas certain que votre vision moderne et durable du tourisme soit consensuelle au sein des membres de la majorité. Et ce plan d’actions ambitieux, raisonné et bénéfique pour la Corse ne s’opérera que si tout le monde œuvre dans le même sens », lance-t-il à Nanette Maupertuis. Avant de lui demander « quelles mesures comptez-vous prendre pour inverser la tendance et inscrire la Corse dans un modèle de développement résolument tourné vers un tourisme durable ? ».
 
Un cap écotouristique 
La présidente de l’ATC saisit la balle au bond pour rappeler « le cap éco-touristique » vers lequel elle a engagé l’île à travers sa feuille de route fondée sur la transition écologique et numérique du tourisme corse. Affirmant que celle-ci est « pleinement partagée dans notre hémicycle et au-delà » et qu’elle est « aussi totalement d’actualité » avec le Green Deal proposé par la nouvelle présidente de la Commission européenne, elle renvoie la balle sur les acteurs du secteur : « Ne fonctionnant pas en économie administrée, il revient aussi aux opérateurs privés de s’inscrire dans cette perspective ». Nanette Maupertuis martèle, encore une fois, son credo du « positionnement stratégique » de la Corse comme « île verte de Méditerranée », « une condition essentielle de différenciation de la destination, face à des concurrents plus industrialisés, mieux armés dans la compétition, au pouvoir de négociation plus grand sur l’ensemble de la chaine touristique ».

La qualité, pas la quantité
Ceci dit, pour la présidente de l’ATC, le développement touristique n’est « clairement pas une course à la quantité de touristes, mais à la mise en œuvre d’un tourisme maitrisé, socialement acceptable, soutenable pour notre environnement et porteur de valeur ajoutée pour notre économie. Ce qui compte, ce n’est pas tant le nombre de touristes, mais la dépense/tête et le revenu net généré par la fréquentation ». Il lui paraît essentiel, au vu de la saturation de certains sites, de s’interroger sur la capacité de charge de la ressource. « Cela justifie pleinement que nous y portions une extrême attention, à commencer par en mesurer les données objectives de flux et d’impact ». Faut-il pour autant stigmatiser les touristes et les considérer comme des prédateurs ? « Non évidemment ! Pour deux raisons. D’abord, en pointe de saison, le nombre de touristes est à peine supérieur au nombre de résidents pour une population effective d’environ 700 000 habitants. Ensuite, c’est à nous d’organiser les plans de gestion des sites et des flux, nous nous y employons ». L’enjeu consiste
« en un meilleur équilibre des flux dans le temps et dans l’espace, ce qui suppose la valorisation et la mise en tourisme des richesses patrimoniales. Je m’y attache en œuvrant et mobilisant des financements par des partenariats public/privé, ce qui me paraît la seule voie de nature à leur redonner vie et fonction ».
 
Un problème d’offre
Concernant la baisse du tourisme, Nanette Maupertuis nuance les mauvais chiffres : « 7% ne représente pas la baisse du tourisme, mais celle des hébergements professionnels marchands. La baisse de fréquentation sur la base des statistiques passagers est de 3% environ par rapport à 2018 qui avait été une année exceptionnelle. Les touristes dorment ailleurs qu’en hôtel, campings ou gîtes… Les seules offres RbnB et Homeways (abritel-homelydays) affichent cette année une croissance à 2 chiffres ». Elle ne cache néanmoins pas son inquiétude face à ce « ralentissement lié indiscutablement à des causes conjoncturelles : crise des gilets jaunes, mauvais temps puis canicule, effet calendaire en mai, manque de sièges ou de rotations sur certains ports et aéroports… Ce tassement démontre en creux le manque de résilience de notre économie touristique face aux chocs exogènes ». Mais qui révèle un problème structurel de l’offre insulaire. « Notre île reste, dans tous les sondages et études, dans le peloton de tête des destinations préférées des consommateurs. Pour autant, la transformation de ce désir en achat de séjours ne se fait pas sur un marché éminemment concurrentiel et très volatile. C’est sur la nature de ce problème que nous travaillons avec l’ensemble des acteurs concernés, notamment dans le cadre du Conseil stratégique du tourisme mis en place en mai dernier par l’ATC ».
 
Une nécessaire adaptation
La présidente de l’ATC prévient que la conjoncture économique pour 2020 n’est pas favorable : « Le dimensionnement des transports est à la baisse, des lignes ferment, les compagnies doivent intégrer des coûts supplémentaires, certains évènements qui lançaient la saison disparaissent et, enfin, notre destination reste paradoxalement chère alors que l’offre est pléthorique ». Pour pallier cette morosité, elle annonce que la Commission « Promotion de l’ATC » a proposé, il y a quelques jours, un certain nombre d’actions ciblées, notamment sur les marchés étrangers, et sollicité des moyens supplémentaires pour porter l’image de la destination. Un plan d’action spécifique pour stimuler l’offre de transport est en préparation avec les Chambres de commerce et l’Office des transports. « La transition ambitieuse, votée en mars 2018, ne s’opérera que si tout le monde joue dans le même sens. Il est crucial aujourd’hui que le tourisme insulaire – plutôt familial, indépendant – s’adapte et joue collectif au regard de la pression concurrentielle et de la volatilité de la demande ». Elle se veut rassurante : « L’ATC assurera pleinement son rôle d’opérateur territorial public et d’ensemblier en charge de la coordination des acteurs et de la promotion de la destination ». Tout en concluant que les batailles dans le monde du tourisme « doivent se livrer sur les marchés extérieurs et pas sur notre territoire ».

  CorseNetInfos du 19/12/19

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